15 novembre 2017 3 15 /11 /novembre /2017 07:00

 

 

Sur le toit du studio où gîte un geai s'épanouit ce matin un liseron bleu virant au mauve.

 

La messagerie numérique de mon téléphone portable – cet objet de la modernité peut s'avérer cocasse au lointain –, porte presto à ma connaissance les tribulations d'un camarade cadet aux confins du Maghreb.

 

De Tanger où commence le spectacle des fellahs arabes, j'apprends que mon infatigable bédouin, qui délaisse aujourd'hui le lit inférieur de l'oued pour la tente hôtelière, gagne en feuilleton Ouarzazate par Chefchaouen, puis rebrousse chemin, longeant à pied les fiers flancs neigeux de l'Atlas jusqu'à Fès, l'idée en tête de pousser jusqu'à  « une sacrée bière bien désaltérante ! » (sic) qu'il savourera juché, j'imagine, à califourchon sur les remparts lusitaniens du port d'Essaouira.

 

« Je passerai, ajoute-t-il bravement, par Meknès, Rabat et Casa (blanca), leurs médinas, leurs kasbahs, leurs piquants piapias... »

 

Gens des nuages de J.M.G. Le Clézio fut, me dit-il, sa lecture caravanière aux degrés du désert. Pourquoi pas ? Une couleur locale. J'aurais pu, tout aussi bien, Tanger montant en flèche du temps de la Villa Muniria, bruissante le jour, ouverte la nuit, lui conseiller pour s'en imprégner et s'espacer, Matisse à la palette pour les yeux éblouis, le Journal de Paul Bowles, la correspondance de William Burroughs, ou les Short Stories de Jack Kerouac. Ou encore les papiers pénétrants d'Allen Ginsberg, Juif extralucide, qui déambule, son Kaddish en poche, dans la mégalopole nord-américaine déjantée qu'est New York, relis donc Henry Miller, en proie, comme le reste du monde désormais ou quasi, au délire, à la psychose et à la paranoïa, cherchant, lui qui vient de si loin, les viatiques qu'il imagine adéquats pour s'extirper, mentalement, le temps d'une existence terrestre, de redoutables toiles d'araignées.

 

Cut-up de moments précipités, emballés, cristallisés. La vie, la littérature, la vie. C'était l'heure H.

 

S'est-il insinué à Volubilis ? Non. Est-ce que je connais ? Bien entendu. Dans la bibliothèque de l'atelier, la carte postale montre, virevoltante, une Diane rousse au bain entourée d'une chaude mosaïque d'oliviers. À l'arrière-plan, on peut distinguer le bourg clos de Moulay Idriss accroché contre l'infortune à son rugueux piton rocheux. Un monde. Un arrière-monde.  

 

Je lui adresse ce texte à méditer :

 

« Comme presque toujours les voyageurs pieux, s'ils rencontrent sur leur route quelque bois sacré ou quelque lieu saint, ont coutume de se répandre en prières, d'offrir des ex-voto, de s'arrêter un moment, de même, à mon entrée dans votre ville sainte, bien que je sois extrêmement pressé, je dois avant tout implorer votre faveur, prononcer une harangue et ralentir ma course. Nulle rencontre en effet ne saurait à plus juste titre suspendre, au nom de la piété, la marche d'un voyageur : ni autel ceint de guirlandes de fleurs, ni grotte ombragée de feuillages, ni chêne chargé de cornes, ni hêtre couronné de peaux, ni même tertre consacré par une enceinte, ni tronc d'arbre auquel la doloire a fait prendre figure humaine, ni gazon imprégné de la fumée des libations, ni pierre baignée de parfums ; car ce sont là des objets peu frappants ; et pour un petit nombre de voyageurs qui les cherchent et les adorent, les autres qui ne les connaissent point ont bien vite passé au-delà. »

 

Qui sait ce qu'abrite le cœur du marcheur éternel... L'histoire d'un certain chameau qui rencontre le chas d'une aiguille... Les vraies richesses ? Une bonne question ces temps-ci...

1 novembre 2017 3 01 /11 /novembre /2017 07:00

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Lever rouge dans un grand vent frais.

 

Venu de Rome, je retrouve mes habitudes vénitiennes.

 

« Allez, un bon décapage ! », entonne la presse citoyenne. Pendant ce temps-là, l'humble peuple liquide se met en route, qui à son étal, qui à sa gondole, qui à son banc de flânerie.

 

Bibliothèques, cafés, retour aux bibliothèques, des conversations, des amours.

 

Tout alentour, aux limites, des contrées jadis si fières sont devenues d'actions concertées en renoncements frileux de splendides poubelles à ciel ouvert. Ici, qui me convient, puisque c'est mon élément, le luxe, une fois, le calme et la volupté.

 

Ce matin, j'ai encore rendez-vous avec Michel. Je vois, j'entends, je sens dans toutes les catégories de la connaissance. Je fais remonter le gai savoir des profondeurs du silence. S'élance du carnet stratège posé bien en évidence sur la table de travail devant la fenêtre qui donne sur le canal très Irish sous la mousse cette note mûrie au feutre noir :

 

« La plupart des hommes ont appris à lire pour servir des buts frivoles, comme ils ont appris à calculer afin de tenir leurs comptes et de ne pas se faire duper lors des échanges commerciaux. Mais de la lecture en tant que noble exercice intellectuel, ils ne savent rien ou presque rien. Pourtant, la seule vraie lecture, au sens élevé du terme, n'est pas celle qui nous berce tel un luxe sans jamais faire appel à nos facultés les plus nobles, mais celle qui exige que nous nous dressions sur la pointe des pieds pour lui consacrer nos heures de veille les plus alertes. »

 

Oui, la bibliothèque est un lieu sauvage de livres.

 

Vers Campo Sant'Anzolo, je navigue au hasard des ruelles de ces quartiers excentrés. Au carrefour de l'incertain et de l'improbable, un bar borgne tenu par un Chinois de Hong Kong à la dégaine vigoureuse. Je m'aventure dans le vestibule. Passant l'autel où fume l'encens, les murs couverts d'idéogrammes. Il faut savoir lire, de haut en bas et de droite à gauche. Paysages de montagnes, de ruisseaux qui vont cascadant, et là, un moine solitaire, chapeau pointu, son bâton de marche à la main. Où cette estampe précise le mène-t-il ? Va pour le café ristretto. Et la petite famille ? Tout roule bien, c'est l'année du coq. Large sourire. On parle de tout, on parle de rien, l'homme, à rebours du pèlerin, aime la société. 

 

Une heure pour moi seul. Je tourne les pages du volume clouté d'or :

 

« Le 6 de Mars, je fus voir la Librerie du Vatican, qui est en cinq ou six salles tout de suite. Il y a un grand nombre de livres atachés sur plusieurs rangs de pupitres ; il y en a aussi dans des coffres, qui me furent tous ouverts ; force livres écris à mein & notammant un Seneque & les Opuscules de Plutarche. J’y vis de remercable la statue du bon Aristide à tout une bele teste chauve, la barbe espesse, grand front, le regard plein de douceur & de magesté : son nom est escrit en sa base très antique ; un livre de China, le charactere sauvage, les feuiles de certene matiere beaucoup plus tendre & pellucide que notre papier ; & parce que elle ne peut souffrir la teinture de l’ancre, il n’est escrit que d’un coté de la feuille, & les feuilles sont toutes doubles & pliées par le bout de dehors où elles le tienent. Ils tiennent que c’est la membrane de quelque abre. J’y vis aussi un lopin de l’antien papirus, où il y avoit des caracteres inconnus : c’est un écorce d’abre. J’y vis le Breviaire de S. Gregoire écrit à mein : il ne porte nul tesmoingnage de l’année, mais ils tienent que de mein à mein il est venu de lui. C’est Missal à peu-près come le nostre, & fut aporté au dernier Concile de Trante pour servir de tesmoingnage à nos serimonies. J’y vis un livre, de S. Thomas d’Aquin, où il y a des corrections de la mein du propre autheur, qui escrivoit mal, une petite lettre pire que la mienne. Item une Bible imprimée en parchemin, de celes que Plantein vient de faire en quatre langues, laquelle le roy Philippes a envoïée à ce Pape, come il dict en l’inscription de la relieure ; l’original du livre que le Roy Henry d’Angleterre composa contre Luter, lequel il envoïa il y a environ cinquante ans, au Pape Leon dixiesme, soubscrit de sa propre mein, avec ce beau distiche latin, aussi de sa mein, Anglorum Rex Henricus, Leo décime, mittit Hoc opus, & fidei testem & amicitiae. Je leus les Prefaces, l’une au Pape, l’autre au Lectur : il s’excuse sur ses occupations guerrieres & faute de suffisance ; c’est un langage latin bon pour scholastique. »

 

Et ceci, ailleurs, mais en cohérence :

 

« Je ne voyage sans livres ny en paix ny en guerre. Toutesfois il se passera plusieurs jours, et des mois, sans que je les employe : Ce sera tantost, fais-je, ou demain, ou quand il me plaira. Le temps court et s’en va, ce pendant, sans me blesser. Car il ne se peut dire combien je me repose et sejourne en cette consideration, qu’ils sont à mon costé pour me donner du plaisir à mon heure, et à reconnoistre combien ils portent de secours à ma vie. C’est la meilleure munition que j’aye trouvé à cet humain voyage, et plains extremement les hommes d’entendement qui l’ont à dire. J’accepte plustost toute autre sorte d’amusement, pour leger qu’il soit, d’autant que cettuy-cy ne me peut faillir. Chez moy, je me destourne un peu plus souvent à ma librairie, d’où tout d’une main je commande à mon mesnage. Je suis sur l’entrée et vois soubs moy mon jardin, ma basse court, ma court, et dans la pluspart des membres de ma maison. Là, je feuillette à cette heure un livre, à cette heure un autre, sans ordre et sans dessein, à pieces descousues ; tantost je resve, tantost j’enregistre et dicte, en me promenant, mes songes que voicy. »

 

La vie exquise de Michel.

 

À cheval ou à l'étude, Montaigne et moi avons trouvé le secret de la félicité.

18 octobre 2017 3 18 /10 /octobre /2017 06:00

 

 

Retour à Rome.

 

Sans autre panorama que la beauté sous le ciel bleu.

 

Je me fais l'effet d'un draveur qui cherche son point d'équilibre dans un monde en mouvement.

 

Le studio bien situé, les pages du carnet sont remplies, un flacon de Valpolicella, deux verres.

 

Dans l'angle, par la fenêtre, je peux apercevoir l'un des plus anciens musées qui soit.

 

Se souvient-on d'Apollonios de Chalcédoine ? Non ? Marc Aurèle a beaucoup appris de sa bouche. Le temps béni de l'instructif enseignement oralisé.

 

À la terrasse d'un bar, après avoir salué les disparus très vivants, j'ouvre le bréviaire :

 

« Tous ces biens que tu désires et que tu cherches à atteindre par des détours, tu peux les avoir dès maintenant, si tu n’es pas ton propre ennemi. Je veux dire si, laissant là tout le passé et te confiant pour l’avenir à la Providence, tu ne t’occupes que du présent et en disposes suivant la sainteté et la justice. Suivant la sainteté, afin d’aimer ton lot, car la nature l’a préparé pour toi et toi pour lui. Suivant la justice, afin de dire la vérité librement et sans ambages, afin d’agir selon la loi et selon la valeur des choses; afin de n’être arrêté ni par la méchanceté, ni par les jugements, ni par les paroles d’autrui. ni même par aucune sensation de la chair qui t’enveloppe, car cela n’importe qu’à ce qui en souffre. Si donc, au moment quel qu’il soit où il faudra partir, il se trouve qu’oubliant tout le reste, tu as respecté [uniquement] ton principe directeur et le Dieu qui est en toi, et craint non point de cesser de vivre, mais plutôt de n’avoir jamais commencé à vivre conformément à la nature, tu seras un homme digne du monde qui t’a engendré, tu cesseras d’être un étranger dans ta patrie, tu ne regarderas plus avec étonnement les événements de chaque jour comme s’ils étaient inopinés, tu ne seras plus suspendu à ceci ou à cela. »

 

Oui, tu peux bien aimer ton lot – et accueillir à l'instant ce baiser sur tes lèvres...

4 octobre 2017 3 04 /10 /octobre /2017 06:00

 

Aujourd'hui, c'est la fête de l'essaim.

 

Un tour par le Revermont des contreforts alpins.

 

Dans la wagon qui tangue dans la vallée, un  journal abandonné sur la banquette m'apprend qu'un brillant chercheur est parvenu à réduire l'eau en poudre. Pour obtenir un litre potable à partir de la préparation, il suffit, dit l'article, d'ajouter de l'eau... Quel progrès !

 

Pendant ce temps-là, charpentière noire (Xylocopa violacea) ou parée d'une guêpière jaune (Mellifera ligustica), l'abeille bosse fort sous les derniers rayons du soleil.

 

Affranchi de la ruche, le citadin fait-il mieux ?

 

Je me glisse sur le gazon d'un pré au flanc d'un coteau, et me focalise sur ce souvenir :

 

« La science de la richesse dans ses branches pratiques consiste à connaître à fond le genre, le lieu et l’emploi des produits les plus avantageux : à savoir, par exemple, si l’on doit se livrer à l’élève des chevaux, ou à celui des bœufs ou des moutons, ou de tels autres animaux, dont on doit apprendre à choisir habilement les espèces les plus profitables selon les localités ; car toutes ne réussissent pas également partout. La pratique consiste aussi à connaître l’agriculture, et les terres qu’il faut laisser sans arbres et celles qu’il convient de planter ; elle s’occupe enfin avec soin des abeilles et de tous les animaux de l’air et des eaux qui peuvent offrir quelques ressources... » Oui, et relisons aussi Columelle dans ce domaine.

 

Pourtant, malgré les sages avertissements des anciens, de lourds crétins peroxydés trompettent qu'exploiteur des ressources naturelles est une situation en vue et enviable...

20 septembre 2017 3 20 /09 /septembre /2017 06:00

 

La déliquescence débridée partout, sauf ici.

 

L'humanité ? Mais il n'y a que des individus. La preuve : dès l'aube chaude, par les rues assoupies, avant que n'éclatent les savantes couleurs automnales, je me retrouve.

 

Calle Fratti Dorsoduro, Rio Terrà Foscarini, Calle Ponte Storto, et retour vers le Campo.

 

Une pierre élégante en forme de banc. Ignorée de tous. Connue de moi seul.

 

Là, dans un coin de pure beauté, j'ouvre le livre tant qu'il est encore temps :

 

« Jadis, quand on voyait les hommes traîner une vie rampante sous le faix honteux de la superstition, et que la tête du monstre, leur apparaissant à la cime des nues, les accablait de son regard épouvantable, un Grec, un simple mortel osa enfin lever les yeux, osa enfin lui résister en face. Rien ne l’arrête, ni la renommée des dieux, ni la foudre, ni les menaces du ciel qui gronde ; loin d’ébranler son courage, les obstacles l’irritent, et il n’en est que plus ardent à rompre les barrières étroites de la nature. Aussi en vient-il à bout par son infatigable génie : il s’élance loin des bornes enflammées du monde, il parcourt l’infini sur les ailes de la pensée, il triomphe, et revient nous apprendre ce qui peut ou ne peut pas naître, et d’où vient que la puissance des corps est bornée et qu’il y a pour tous un terme infranchissable. La superstition fut donc abattue et foulée aux pieds à son tour, et sa défaite nous égala aux dieux... »

 

Et reprends ma promenade méditative.

13 septembre 2017 3 13 /09 /septembre /2017 06:00

File:Cap Corse-Tours génoises.jpg

 

Exit la rentrée des classes !

 

D'un cap en Corse, je vois passer toutes sortes d'embarcations.

 

Dans le courant. À contre-courant.

 

Je n'ai pas la berlue, mais c'est bien moi, là-bas, sur le gaillard d'avant, les feuilles au vent :

 

« L’aube d’or et la soirée frissonnante trouvent notre brick au large en face de cette villa et de ses dépendances qui forment un promontoire aussi étendu que l’Épire et le Péloponèse, ou que la grande île du Japon, ou que l’Arabie ! Des fanums qu’éclaire la rentrée des théories ; d’immenses vues de la défense des côtes modernes ; des dunes illustrées de chaudes fleurs et de bacchanales ; de grands canaux de Carthage et des embankments d’une Venise louche ; de molles éruptions d’Etnas et des crevasses de fleurs et d’eaux. Des glaciers, des lavoirs entourés de peupliers d’Allemagne, des talus de parcs singuliers ; et les façades circulaires des « Royal » ou des « Grand » de quelque Brooklyn ; et leurs railways flanquent, creusent, surplombent les dispositions de cet hôtel, choisies dans l’histoire des plus élégantes et des plus colossales constructions de l’Italie, de l’Amérique et de l’Asie, dont les fenêtres et les terrasses, à présent pleines d’éclairages, de boissons et de brises riches, sont ouvertes à l’esprit des voyageurs et des nobles, qui permettent, aux heures du jour, à toutes les tarentelles illustres de l’art, de décorer merveilleusement les façades du Palais Promontoire. »

 

La Terre, encore un tour...

30 août 2017 3 30 /08 /août /2017 06:00

 

Allongé dans l'herbe fraîche d'un plateau ardéchois, je contemple les étoiles à la ronde.

 

Beaucoup de pratique, un peu de théorie aussi :

 

« De la droite et de la gauche du monde ; théories des Pythagoriciens ; citation du Traité du mouvement des animaux ; les trois dimensions, le haut et le bas, la droite et la gauche, le devant et le derrière ; détermination de ces notions ; leurs relations à nous et à nos organes. Critique de la théorie des Pythagoriciens, qui n’ont tenu compte que de la droite et de la gauche, et qui ont omis les autres principes. Le haut du monde est le pôle que nous ne voyons pas ; le bas est le pôle qui est au-dessus de nos têtes ; la droite est le point où se lèvent les astres autres que les planètes ; la gauche est le point où ils se couchent. Le pôle invisible est à droite ; le nôtre est à gauche ; renversement de ces positions par rapport aux planètes. »

 

Là ! Cette pléiade me fait signe à travers l'espace-temps.

16 août 2017 3 16 /08 /août /2017 06:00

Friedrich Preller der Ältere - Odysseus and Nausicaa, 1864.jpg

 

Nouveau périple circumasiatique.

 

J'ai écumé la jungle, les débris récitatifs et les lagons.

 

Me vois de face, de dos.

 

Ouvre le livre aux rivages :

 

« O Muse, conte-moi l'aventure de l'Inventif :

celui qui pilla Troie, qui pendant des années erra,

voyant beaucoup de villes, découvrant beaucoup d'usages,

souffrant beaucoup d'angoisses dans son âme sur la mer

pour défendre sa vie et le retour de ses marins

sans en pouvoir pourtant sauver un seul, quoi qu'il en eût :

par leur propre fureur ils furent perdus en effet,

ces enfants qui touchèrent aux troupeaux du dieu d'En Haut,

le Soleil qui leur prit le bonheur du retour...

À nous aussi, Fille de Zeus, conte un peu ces exploits ! »

 

Chez moi aujourd'hui dans la page blanche.

2 août 2017 3 02 /08 /août /2017 06:00

 

Vers les zones australes :

 

« Le pays de Wamasai est situé dans la partie orientale de l’Afrique centrale, entre la côte de Zanguebar et la région des grands lacs, où le Victoria-Nyanza et le Tanganiyka forment autant de mers intérieures. Si on le connaît en partie, c’est qu’il a été visité par l’anglais Johnston, le comte Tékéli et le docteur allemand Meyer. Cette contrée montagneuse se trouve sous la souveraineté du sultan Bâli-Bâli, dont le peuple est composé de trente à quarante mille nègres.

À trois degrés au-dessous de l’Équateur, se dresse la chaîne du Kilimandjaro, qui projette ses plus hautes cimes – entre autres celle du Kibo ­ à une altitude de 5704 mètres. Cet important massif domine, vers le sud, le nord et l’ouest, les vastes et fertiles plaines du Wamasai, en se reliant avec le lac Victoria-Nyanza, à travers les régions du Mozambique.

À quelques lieues au-dessous des premières rampes du Kilimandjaro, s’élève la bourgade de Kisongo, résidence habituelle du sultan. Cette capitale n’est, à vrai dire, qu’un grand village. Elle est occupée par une population très douée, très intelligente, travaillant autant par elle-même que par ses esclaves, sous le joug de fer que lui impose Bâli-Bâli.

Ce sultan passe à juste titre pour l’un des plus remarquables souverains de ces peuplades de l’Afrique centrale, qui s’efforcent d’échapper à l’influence, ou, pour être plus juste, à la domination anglaise.

C’est à Kisongo que le président Barbicane et le capitaine Nicholl, uniquement accompagnés de dix contremaîtres dévoués à leur entreprise, arrivèrent dès la première semaine du mois de janvier de la présente année. »

 

Où tout ceci nous mènera-t-il ?

19 juillet 2017 3 19 /07 /juillet /2017 06:00

File:Francis Carco 1930.jpg

 

Un bal au val de Marne.

 

Trilles et treilles.

 

L'air m'enveloppe :

 

« De grosses tulipes de lumière jaune ruissellent, écrasées dans les glaces. J’aime ce bar de métal clair, d’une ligne sobre et colorée. Des citrons, qu’on épluche, répandent une attirante odeur d’éther. D’autres aromes plus lourds ajoutent à cette odeur et la composent davantage. »

 

Et le mouvement m'emporte :

 

« Le beau couple tourne, il tourne lentement, selon la cadence, ou bien file tout droit — l’homme à reculons – d’un angle à l’autre de la salle. Là, il vire sur lui-même et reprend sa marche souple jusqu’à l’angle prochain qu’il évite par une volte-face savante. Au milieu des danseurs, il garde un souci de la mesure vraiment admirable. Quel mépris pour le trottin écervelé qui tourbillonne et gâche tout, pour le calicot valseur.

L’homme, un couvreur aux pantalons à la hussarde, au chapeau morès des nervis, tire à lui la fille : il l’étend en travers, sur sa poitrine : étreinte amoureuse et plastique. Emmanchés de la sorte les deux amants accompliront leur joie rythmée par l’orchestre. Et, tout autour, dans ce bal des Folies-Gauloises, les couples s’entrechoquent : ils s’enfoncent et se désunissent.

Bob et Marie-la-thune, très beaux, très sveltes et sobres, dansent sous la lumière électrique de la salle irrégulière. »

 

Manège !