Mon métier et mon art, c'est vivre...
C'est un rêve : filmer pendant une heure un écrivain en train d'écrire.
Le dispositif serait très simple.
D'abord, un endroit propre et bien éclairé.
Cette recommandation de mon ami Ernest vaut pour toutes les circonstances.
Un atelier, une chambre, un scriptorium feraient l'affaire.
Un jardin a ma préférence, à la campagne, à la montagne, au bord de l'eau.
Oui, une table ronde de plein air au bord de l'eau, ce serait parfait.
Un bel arbre en guise de parasol.
Encore faut-il trouver l'écrivain. Un véritable auteur.
Il y en a bien quatre ou cinq auxquels je pense.
Pour les autres, non moins puissants que les premiers, il me faudrait relire in extenso le schéma de montage qui me permettrait de faire fonctionner la machine à remonter le temps.
Ça, c'est une autre de mes lubies.
Je parle de mon rêve à un réalisateur ainsi qu'à plusieurs documentaristes qui trouvent que c'est une idée superbe.
L'écrivain travaille. L'encre, bleue ou noire, du stylo emplit les pages.
Luxe, calme et volupté.
La caméra a choisi d'emblée et très naturellement le meilleur angle, et, qui sait ?, le meilleur profil.
Les seule choses distinctes que l'on entende sont d'abord l'aller-retour de la plume sur le papier, puis une sonate pour piano émise par un dispositif moderne, et, plus loin, les cris de mouettes sur le rivage.
On sait fabriquer des microphones ultrasensibles.
Cette scène pendant une bonne heure et rien d'autre. Si je peux dire...
Pas de commentaire. Aucun souci de rentabilité. Pas de compromis marchand.
L'art en action.
Cet écrivain serait, en y réfléchissant, de toute éternité.
Mais n'est-ce pas ma bobine que je vois à présent sur le film ?