30 décembre 2010 4 30 /12 /décembre /2010 07:00

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Une fois tous les deux ou trois mois, autour d'un verre, prendre le pouls du monde à l'écoute des médecins, généralistes, comme on dit, ou spécialistes, est, pour moi, source instructive et parfait régal. Surtout si le médecin est une femme, belle (oui !) et intelligente (oui, oui !). Au fil du temps, mon service personnel de documentation planétaire a pris des dimensions himalayesques -des informations de première main qui valent leur pesant d'or.

 

Pendant la conversation, l'humanité, la pauvre petite humanité, se retrouve vite nue. Le mot, terrible, juste et profond, de Kafka, très fatigué, à son médecin : Si vous ne me tuez pas, vous êtes un assassin.


Quand il m'arrive, à mon tour, de consulter, rarement, il est vrai, je ne peux pas m'empêcher de m'exclamer "Que de malades !" en poussant la porte de la salle d'attente. Ma forme d'humour est appréciée diversement...Oui, l'humanité des malades est bien patiente, surtout ces temps-ci où, en toute impunité, le faux scientifique vaut le vrai.

 

Immanquablement, je commence par demander au praticien s'il va bien. J'aurais pu faire un bon médecin, on me l'a soufflé.  Allure, précision, sûreté du diagnostic, British flegme - j'en suis un à ma façon, on m'appelle docteur à l'occasion...

 

Pour un écrivain, l'oreille est importante : un écrivain sans oreille est comme un boxeur sans main gauche. Eh oui, mon cher Ernest, et ton père connaissait la médecine. Fils de médecin, ce n'est pas indifférent. Les yeux aussi, et voir sa vue qui baisse redouble l'invitation au carpe diem.

 

Sur la table de travail dans cet autre domicile discret, une reproduction, époque classique, du voyage en rouge et bleu de Tobie en compagnie de l'archange Raphaël. C'est un archange bénéfique qui guérit la cécité.

 

Borges y pensait-il quand il dictait son Éloge de l'ombre ? 

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