I remember : je remembre la mémoire.
L'atelier est sous la neige : suspension du temps alentour.
Un soir des années 70, alors que j'étais ivre de fatigue après des jours dans les mots, Jean-Pierre Vernant, pédagogue habituellement adroit et sensible, me tire cette fois-là de ma torpeur d'une frappe sonore sur la table de notre séminaire au Collège de France. Nous nous regardons aussi surpris l'un que l'autre, et éclatons de rire !
Je me souviens de tout : les lettres grecques tracées sur le cahier d'écolier, les règles de l'accentuation (paroxyton, proparoxyton...), et les cours de grec ancien que, comble suprême de la clownerie, je donnais à mes cadets. Quand j'y pense ! Non, je ne regrette rien. La vie était belle. Elle l'est toujours.
Brusque désir de reprendre Sophocle ce matin en repensant à tout ça.Une œuvre essentielle qui me sert toujours, un jour ou l'autre. Vous ne connaissez pas ? En livre de poche, je vous dis, et vous aurez une critique générale du Spectacle qui n'a pas pris une ride.
Délivrance : la voix du réveil dans la nuit éternelle vaut à jamais toutes les huiles essentielles.