9 novembre 2010 2 09 /11 /novembre /2010 11:30

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Par une matinée de printemps, au sud de Moscou, dans le temps d'avant, une automobile de type Volga zigzaguait sur la route de Peredelkino (en russe : Переделкино) pour éviter non seulement les nids-de-poule mais épargner aussi les volatiles bien vivants qui, eux, déboulaient en tous sens sur la chaussée.

 

L'entrée du village derrière soi, une datcha sans apprêt au milieu de fleurs diversicolores : c'est ici que Boris Pasternak aura vécu ses dernières années dans une relégation presque agréable après qu'il eût été contraint en 1958, par les autorités d'alors, de décliner le prix Nobel (et la somme d'argent - la récompense - non négligeable qui allait avec).

 

Sur les étagères en pin de sa bibliothèque, ce qui m'avait frappé était une collection impressionnante d'auteurs français ou de langue française (je me souviens d'un Montaigne, d'un Rousseau et d'un Diderot dans le format du livre que l'on glisse aisément dans sa poche pour la rêverie en promenade), qui jouxtait une collection non moins représentative des meilleurs écrivains américains - Hemingway y figurait en belle place.

 

Après le tour de la maison, je fus invité à me rendre au cimetière local pour voir la tombe de Pasternak. S'il est vrai qu'un homme libre ne pense à rien moins qu'à la mort, comme l'écrit Spinoza, de temps à autre, je n'ai rien contre une balade dans un bon vieux churchyard du Devon aux pierres tombales moussues et à la pelouse impeccable de dignité.

 

Aucun cénotaphe, une simple dalle, le portrait en relief de Pasternak, et sur le pourtour de la pierre froide une multitude de roses, les unes végétales, les autres en papier comme si elles sortaient de mains d'enfants.

 

Mais c'est un autre souvenir que je veux garder de cette rencontre d'avril : la babouchka, Cerbère des lieux, étant occupée dans une pièce du bas à préparer le thé à l'aide d'un antique samovar, j'en ai profité pour poser sur mon crâne la casquette de Pasternak, une casquette rustique, qui était accrochée à une patère à l'entrée de son atelier .

 

Voilà comment, en toute humilité, j'ai pu faire revivre, courtement mais sûrement, le docteur Jivago...

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