Mi-temps des vacances estivales à la pointe du continent.
Ça souffle à bâbord, ça fume à tribord !
Pas un chat.
Verte, une touffe frissonnante de lichen.
Trois mouettes lavées de lumière, elles rasent la houle.
Je me suis construit une crique de forban au déchiqueté de la roche.
Anatole le Braz dit de lui qu'il apporta « la poésie de l'espace » et « le frisson de l'infini ».
Ce n'est pas tout à fait faux, et il y a du vrai.
Je cale l'aventure sur la page au moyen de galets frottés de sel :
« En quittant la péninsule cambodgienne, la flotte se dirigea vers la petite île de Java, dont Kublaï-Khan n’avait jamais pu s’emparer, île qui possède de grandes richesses, et qui produit en abondance le poivre, la muscade, le cubèbe, le girofle et autres précieuses épices. Après avoir relâché à Condor et à Sandur, à l’extrémité de la péninsule cochinchinoise, Marco Polo atteignit l’île de Pentam (Bintang), située près de l’entrée orientale du détroit de Malacca, et l’île de Sumatra, qu’il nomme Java-la-Petite. Cette île est tellement au midi, dit-il, que jamais on n’y voit l’étoile polaire, – ce qui est vrai pour les habitants de sa partie méridionale. C’est une fertile contrée, où le bois d’aloès pousse merveilleusement ; on y rencontre des éléphants sauvages, des rhinocéros, que Marco Polo appelle des licornes, et des singes qui vont par troupes nombreuses. La flotte fut retenue pendant cinq mois sur ces rivages par suite du mauvais temps, et le voyageur mit ce temps à profit pour visiter les principales provinces de l’île, telles que Samara. Dagraian, Labrin qui compte un grand nombre d’hommes à queue, évidemment des singes, et Fandur, c’est-à-dire l’île Panchor, où pousse le sagoutier, duquel on tire une farine qui sert à fabriquer un pain excellent.
Enfin, les vents permirent aux vaisseaux de quitter Java-Ia-Petite. Après avoir touché à l’île Necaran, qui doit être l’une des Nicobar, et au groupe des Andaman, dont les naturels sont encore anthropophages comme au temps de Marco Polo, la flotte, prenant la direction du sud-ouest, vint atterrir sur les côtes de Ceylan. Cette île, dit la relation, était bien plus grande autrefois, car elle avait trois mille six cents milles, d’après ce que l’on voit dans la mappemonde des pilotes de cette mer ; mais le vent du nord souffle si fort en ces parages qu’il a fait enfoncer une partie de l’île sous l’eau, tradition que l’on retrouve encore parmi les habitants de Ceylan. C’est là que se recueillent en abondance les nobles et bons rubis, les saphirs, les topazes, les améthystes et autres pierres précieuses, telles que grenats, opales, agates et sardoines. Le roi du pays possédait à cette époque un rubis long d’une paume, gros comme le bras d’un homme, vermeil comme du feu, et que le grand khan voulut vainement acheter à ce souverain au prix d’une cité. »
Encore, en cachette au temps dérobé, sous la Grande Ourse et l'étoile polaire !