2 mai 2018 3 02 /05 /mai /2018 06:00

 

 

Une quinzaine à bifurquer d'une zone l'autre dans le mouvant Munich et le frais Francfort, puis, hop !, direction la lagune en bleu pailleté d'or.

 

Campo Santa Marina, je m'offre, dans l'ordre, affranchi du brouhaha ambiant que ravivent les forains sournois armés de microphones prompts à la réclame, un carnet bleu, un cigare mile fleurs et un café. Les gros titres, très psychotiques, à la devanture du kiosque : « La guerre civile larvée ». Si vile ? Une contradiction, encore une, dans les termes.

 

Le vendeur de journaux connait mes habitudes, qui n'en sont jamais :

« Alors, Paulo ?

– Tutto va bene...

– Et la famille ?

– Si, tutto va bene. 

– Et la santé ?

– Molto piacere, si, si, tutto va bene... »

 

Donc, tout va bien. En viendrait-on à en douter ? Qui voudrait-on dissuader d'y croire ? Je vide ma tasse, et voici déjà le joyeux branle-bas au débarcadère ! Le bateau léger de coque rouge et verte qui fuite sur l'eau m'emporte à Sant'Erasmo où je remplis pour une poignée d'heureux euros mon essentiel panier de fruits et de légumes à somptueuse maturité. Ici, foin de supermarché, ailleurs toujours plus super, n'est-ce pas ?, qui va tannant, comme on dit à Montréal, les gogos à marche forcée. Ce verger vénitien où l'on circule entre ciel et terre le nez aux embruns est une splendeur intemporelle qui ravit le promeneur impénitent.

 

À l'ombre soutenue d'un oranger, j'imagine déjà le festin nutritionniste que je vais concocter au fumant du fourneau. Comme il me reste tout le temps de la vie avant de prendre le bateau du retour et de passer chez le caviste pour y ravir un flacon de Valpolicella à déguster sur la  terrasse fleurie de mon discret studio d'un quartier distant, j'en profite pour tourner les pages :

 

« Le pouvoir fasciste est caractérisé en premier lieu par le fait que sa fondation est à la fois religieuse et militaire, sans que des éléments habituellement distincts puissent être séparés les uns des autres : il se présente ainsi dès la base comme une concentration achevée... »

 

Au fronton de la mémoire, le bleu du ciel, je vous dis.

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