À l'hôtel, je pioche dans la bibliothèque du bon secours qui enveloppe la cheminée fumante et en tire l'extrait suivant qui me laisse rêveur :
« On sait à quel point ce que les savants appelaient « la grande marée du siècle » avait surexcité l’imagination des Parisiens. Nous aurions mauvaise grâce à railler, après coup, un mouvement bien naturel de curiosité. Ces magnifiques spectacles valent la peine qu’on se déplace. — Une représentation de l’Océan ! Quel drame peut soutenir la comparaison avec cette solennité ? Seulement, quoique nous ayons cédé à l’entraînement général, notre attente n’a pas été déçue, parce que nous n’avions pas compliqué le programme d’une tempête. Un certain nombre de traversées assez longues, des séjours dans des ports de mer, nous ont appris qu’une marée n’est pas un ouragan, mais bien un phénomène régulier s’accomplissant à l’heure prévue, avec une précision presque chronométrique, et nous pensions d’avance qu’un niveau plus élevé de quelques centimètres que celui de la veille ne pouvait pas produire de ces cataclysmes à la Martynn, qu’on semblait exiger. Sur divers points du littoral, peu s’en est fallu que l’Océan ne fût sifflé comme un acteur qui oublie son rôle, et que le public désillusionné ne redemandât son argent !
En cas que les grandes eaux ne jouassent pas correctement, nous avions choisi un site capable de nous dédommager par sa beauté intrinsèque. Dans l’espace d’une nuit, le chemin de fer nous jeta à Rennes, où une diligence nous reprit et nous transporta à Pontorson. Une carriole nous fit franchir le reste de la route, et nous pûmes apercevoir, au bout du Couesnon canalisé, que longeait notre voiture, la pittoresque silhouette du mont Saint-Michel. »
Il convient de remarquer la grammaire temporelle...