Bleu parfait.
Aux premières heures du jour dans ma chambre louée à un courageux pêcheur hauturier, je relis les Confessions de Jean-Jacques. Des crêtes rocheuses, vue sur le golfe déjà bouillonnant de pimpantes embarcations.
Hier, Villa Cimbrone, Terrasse de l'Infini, la bien nommée. Manège de corneilles, allant et venant d'un buste d'albâtre l'autre, très dignes. Les arbres somptueux, la floraison, mirifique. Un enchantement.
Du carnet, je prélève cette note truffée d'exquise mauvaise foi :
« J. J. Rousseau, fameux relaps, écrivain très éloquent, philosophe visionnaire, jouant la misanthropie et ambitionnant la persécution, écrivit un avant-propos à sa Nouvelle Héloïse, qui est unique : il insulte le lecteur et ne l’indispose pas. Un petit avant-propos étant de saison dans tout ouvrage, j’en écris un aussi ; mais c’est pour vous procurer ma connaissance, mon cher lecteur, et pour me concilier votre amitié : vous verrez, j’espère, que je ne prétends rien ni par mon style, ni par des nouvelles, et surprenantes découvertes en morale, comme l’auteur que je viens de nommer, qui n’écrivait pas comme on parle, et qui au lieu de décider en conséquence d’un système, il prononçait des aphorismes résultant d’un enchaînement casuel de ses chaudes circonlocutions, et non pas de la froide raison : ses axiomes sont des paradoxes faits pour faire éternuer l’esprit : passés à la coupelle de l’entendement, ils se dispersent en fumée. Je vous préviens que dans cette histoire vous ne trouverez rien de nouveau que l’histoire, car pour ce qui regarde la morale, Socrate, Horace, Sénèque, Boèce et plusieurs autres ont tout dit : tout ce que nous pouvons faire encore ne consiste qu’en portraits ; et il n’est pas nécessaire de posséder un grand génie pour en faire même de fort jolis. »
À livre ouvert...